Critique exposition Maison du Cygne

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ean Pierre Mathieu_ Maison du Cygne

Temps, espace : deux dimensions dans lesquelles naît, vit et meurt l’homme. Qui ne cesse d’inventer les moyens de les contourner, de les réduire ou de les étirer. Dans sa chair, dans sa pensée. Créant ainsi les matériaux, outils, engins et modes échappatoires de sa condition mortelle, éphémère, instantanée en quelque sorte. L’homme n’avance, ne marche dans son évolution qu’en créant, inventant, innovant.

Jean-Pierre Mathieu est de ces hommes qui se questionnent sur le temps, l’espace ; sur le moment présent, subtile effervescence qui se dilue dans l’oubli, à peine effleuré et vécu ; sur l’espace, celui du cosmos, d’un univers infini et mystérieux tout comme son espace mental intérieur. Questionnement qu’il tente de résoudre à travers son art.

Sans tricherie, sans complaisance, à mains nues, il livre bataille, lutte contre la mort de toute chose, transforme, redonne vie, harmonise, au moyen d’une peinture forte, épaisse, généreuse et d’éléments - déchets de matériaux façonnés par l’industrie ou la nature, que ce soient des bois flottés, des objets abandonnés, des copeaux, des débris métalliques, de la sciure d’aluminium, des chutes de plexiglas, scories, résidus de matériaux de chantiers, d’usines, voués à la décharge, au rebut – qu’il récupère dans un cheminement heureux de trouvailles plus ou moins hasardeuses.

L’artisan, au sens noble du terme, (il est aussi décorateur) et l’artiste autodidacte qu’il est tout à la fois, réunissent ces deux qualités et savoirs faire, connaissances intimes avec les matières et leurs effets pour produire une œuvre originale, sans concessions, pérenne, élaborée totalement depuis la fabrication des supports jusqu’à l’ultime étape des glacis par des gestes sûrs, d’une puissance maîtrisée qui triture la matière en multiples couches superposées, flirtant parfois à la limite de la sculpture.

Pour Jean-Pierre Mathieu, les gestes sont paroles, mots et vice versa, jetés en résonnances et vibrations dans le cosmos, dharma, dit-il, en récusant l’anodin. Ses créations sont rigueur et chaos, failles et reliefs, rupture et harmonie, magma et fusion, braises et cendres, trajectoires de vie, de sang et de pulsations dans le vide cosmique de son univers, cris et silences, éruptions tendres au cœur de panaches telluriques. Des feux allumés dans l’espace du tableau qui ne cessent de brûler. De l’art qui nous éclaire, nous embrase.Larck Maack – février 2009